M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme mes collègues sénateurs des Français de l'étranger, je centrerai mon intervention sur l'examen des crédits alloués au programme 151, « Français à l'étranger et affaires consulaires ».

Monsieur le ministre, je vous adresserai une première requête : pourriez-vous veiller à la publication rapide de la nouvelle organisation du ministère ? Vous nous avez certes communiqué quelques avant-projets, mais il serait maintenant utile d'aboutir et, en particulier, d'indiquer ce qu'il adviendra de la DGCID, la direction générale de la coopération internationale et du développement : l'incertitude actuelle entraîne un certain trouble, peut-être épargnés aux services de votre ministère, mais qui frappe les postes consulaires, où, pour certaines questions, personne ne sait plus à qui s'adresser. Il serait donc de bonne politique de publier le nouvel organigramme.

Les crédits du programme 151 seront de nouveau en diminution en 2009. La baisse, de 0,2 %, est certes modeste, mais elle vient après de nombreuses autres – elle atteignait plus de 8,3 % dans le budget pour 2008 –, et ce alors même que les communautés expatriées augmentent. Bien entendu, l'action consulaire suit cette évolution budgétaire, que nous déplorons.

Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le rôle des consuls et des consuls généraux. Le système ne tient aujourd'hui que grâce à leur action et à leur dévouement : ils se tuent véritablement à la tâche, travaillant le samedi, le dimanche, s'occupant de tout parce qu'ils n'ont plus d'effectifs, plus de cadres. Ils sont donc la cheville ouvrière du dispositif, grâce à laquelle tout tient et à défaut de laquelle tout risque de s'écrouler.

J'ai l'impression, après avoir visité de nombreux postes consulaires, que leurs personnels souffrent de ne pas être considérés. Ils sont en quelque sorte les soutiers du ministère et je crois exprimer leur sentiment – ils ne me l'ont pas demandé ! – en disant qu'ils souffrent de ne pas être reconnus à leur juste valeur.

Sur les autres éléments du programme 151, je note que les crédits alloués à l'action sociale en faveur des Français de l'étranger augmentent légèrement en 2009 : 16 millions d'euros, contre 15,57 millions d'euros en 2008. Cependant, pour les années suivantes, c'est une baisse qui est anticipée dans votre projet triennal.

En revanche, les crédits consacrés à l'emploi et à la formation professionnelle des Français de l'étranger – sujet important – sont maintenus au même niveau qu'en 2008, 800 000 euros, c'est-à-dire pas grand-chose. C'est un choix que je déplore parce que développer la formation professionnelle permet de maintenir les Français de l'étranger dans les pays où ils vivent et évite d'avoir à les rapatrier en France, avec toutes les difficultés que cela entraîne. Or ces crédits ont baissé de 28 % en 2008 et de 34 % en 2007, c'est-à-dire au total de plus de 50 %.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, je souhaitais vous demander si le futur Office français de l'immigration et de l'intégration, l'OFII, que nous a présenté hier M. Hortefeux, continuera de participer aux actions relatives à l'emploi et à la formation professionnelle des Français de l'étranger, mission qui est actuellement assurée par l'ANAEM, l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations. Au demeurant, le Sénat a examiné hier un amendement visant à réduire les crédits de l'ANAEM ; je l'ai combattu parce que j'estime que cela aurait pour conséquence de réduire les crédits disponibles pour la formation professionnelle des Français établis à l'étranger.

J'évoquerai au passage, bien que cela ne dépende pas de votre ministère, les problèmes de délais d'obtention des certificats de nationalité. Nous avons l'impression de répéter sans cesse la même chose ! On demande des certificats de nationalité, alors même que M. le directeur des Français à l'étranger a bien donné les instructions nécessaires pour que l'on n'en réclame pas un à tout propos.

Le problème ne relève donc pas de vos services : il vient de la Chancellerie puisque c'est le tribunal de la rue du Château-des-Rentiers qui n'a pas assez de greffiers qualifiés pour délivrer ces certificats. De ce fait, les Français de l'étranger attendent vingt, vingt-cinq, voire trente mois, ce qui crée des situations juridiquement aberrantes et humainement insupportables.

J'en viens aux questions relatives à l'enseignement français à l'étranger, qui ont été abordées par plusieurs orateurs, et je me réjouis de l'intervention de notre collègue Robert del Picchia : il a reconnu le bien-fondé d'un certain nombre des critiques qui sont formulées, et il n'était pas loin de reprendre à son compte notre proposition initiale de passer par la voie d'une augmentation de l'enveloppe consacrée aux bourses, tout le monde étant par ailleurs d'accord sur l'objectif.

M. Robert del Picchia. En effet !

M. Richard Yung. M. del Picchia a eu la grande sagesse d'évoquer le programme de Ségolène Royal. (Sourires.) Je l'en remercie, il rend hommage à la vertu !

M. Jean-Pierre Chevènement. N'en faites pas une martyre !

M. Richard Yung. Je rappelle que ce programme, que je connais quand même un petit peu, était très simple : il consistait à dire que nous parviendrions au même objectif en portant l'enveloppe des bourses de 52 millions ou 53 millions d'euros à 75 millions ou 80 millions d'euros. Telle était la méthode proposée.

L'argument essentiel à mes yeux est le suivant : ce système, tel qu'il est mis en œuvre, a pour inconvénient d'augmenter les frais de scolarité pour les enfants non français. Or ce système ne tient que parce qu'il y a des enfants non français dans nos établissements, et dans une proportion d'environ deux tiers. Autrement dit, si nous écartons les élèves étrangers – mais ils ne vont pas tous partir, Dieu merci ! – il n'y aura plus d'enseignement français à l'étranger.

Par conséquent, en faisant porter le poids de la gratuité sur les enfants non français, on envoie un message négatif aux familles d'élèves étrangers : « Ne mettez plus vos enfants dans nos écoles ! »

Autre conséquence, l'AEFE, qui est étranglée financièrement par d'autres mesures, prévoit de prélever une sorte de super-taxe de 6 % sur les frais d'écolage des écoles conventionnées et de 2 % pour les écoles homologuées.

Selon mes informations, c'est une mesure qui passe évidemment très mal et qui risque d'avoir pour conséquence de pousser certains des 400 établissements à quitter le sein généreux et maternel de l'AEFE, qui doit superviser le système.

Cette mesure est très dangereuse parce qu'elle entraînera le « détricotage » du réseau éducatif français à l'étranger. Nous devons l'éviter à tout prix et je pense qu'il faudra revenir sur l'idée de ces taxes abusives, dont je me demande d'ailleurs quel est le fondement juridique.

Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai l'amendement de la commission des affaires étrangères ou celui de la commission des finances, visant à instaurer un double plafonnement en fonction, d'une part, des revenus des parents et, d'autre part, du montant des droits de scolarité.

De la même manière, j'apporterai mon soutien à l'amendement présenté par notre collège Monique Cerisier-ben Guiga et visant à attribuer 600 000 euros au financement du programme FLAM, « Français langue maternelle », qui rencontre un énorme succès, pour un coût relativement modeste, et qui est une sorte de guichet d'entrée dans le système éducatif francophone.

Telles sont les principales observations que je souhaitais formuler, monsieur le ministre, et qui expliquent que nous aurons quelques hésitations à voter les crédits de votre mission