Le 27 juillet, j’ai adressé au ministre de la justice, Éric Dupond-Moretti, une lettre relative aux enfants franco-allemands au centre d’un conflit parental.

Monsieur le Ministre,

Je souhaite attirer votre attention sur les litiges familiaux franco-allemands portant sur l’autorité parentale et la garde des enfants.

J’ai récemment été interpellé par l’association Enfants Otages, qui rassemble « des parents dont les enfants ont pour point commun d’être nés d’une union franco-allemande qui a mal fini et qui s’est alors très vite transformée en cauchemar ». Cette association appelle à « mettre fin aux enlèvements d’enfants organisés par l’État allemand […] depuis plus de 30 ans ».

Il est inquiétant de constater que certaines juridictions allemandes refusent parfois d’appliquer des décisions rendues par des juridictions françaises, et cela en méconnaissance des dispositions du règlement européen dit « Bruxelles II bis » relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et de responsabilité parentale.

Un autre motif de préoccupation est le caractère discriminatoire de mesures prises à l’encontre de parents français par l’office allemand de l’aide sociale à l’enfance (Jugendamt). Ce dernier joue un rôle prépondérant dans les litiges familiaux transnationaux et recommande quasi systématiquement d’accorder la garde des enfants binationaux au parent allemand.

Dans une résolution du 29 novembre 2018, le Parlement européen « constate avec une vive inquiétude que les problèmes […] concernant le système allemand du droit de la famille, dont le rôle controversé du Jugendamt, ne sont toujours pas résolus ».

Par ailleurs, le Parlement de Strasbourg considère, à juste titre, que « la non-reconnaissance et la non-application par les autorités allemandes compétentes de décisions et d’arrêts pris par les autorités judiciaires d’autres États membres de l’Union dans les litiges familiaux ayant une dimension transfrontière peuvent constituer une violation du principe de reconnaissance mutuelle et de confiance mutuelle entre États membres, ce qui de fait met à mal la protection effective de l’intérêt supérieur de l’enfant ».

Devant la persistance de difficultés liées aux procédures et pratiques adoptées par les autorités allemandes, il conviendrait, à mon sens, de rappeler à l’Allemagne les obligations qui lui incombent en vertu de la convention relative aux droits de l’enfant (prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, respect du droit de l’enfant d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, etc.).

Il conviendrait aussi de rappeler aux autorités allemandes qu’elles sont tenues, en vertu du règlement dit « Bruxelles II bis », de reconnaître et d’exécuter les décisions rendues dans un autre État membre dans les affaires impliquant des enfants.

Il serait par ailleurs opportun de renforcer la coopération judiciaire et administrative entre la France et l’Allemagne (échanges de bonnes pratiques, échanges de fonctionnaires des services sociaux, amélioration de la communication entre les autorités centrales, etc.), ainsi que d’améliorer l’accompagnement des parents français dans leurs démarches auprès des autorités allemandes.

Vous remerciant d’avance pour l’attention que vous voudrez bien porter à la situation des enfants franco-allemands au centre d’un conflit parental, je vous prie de croire, monsieur le Ministre, à l’expression de ma haute considération.

Richard YUNG