Le 8 septembre, Claudine LEPAGE et moi-même avons interpellé le ministre des affaires étrangères, M. Alain JUPPÉ, sur l’avenir du centre des archives diplomatiques de Nantes (CADN).

Les archives des postes diplomatiques et consulaires sont actuellement hébergées dans un bâtiment dont le Quai d’Orsay est locataire. La direction des archives du ministère des affaires étrangères envisage de les transférer du CADN vers le centre des archives diplomatiques de la Courneuve, qui abrite les fonds émanant des services de l’administration centrale.

Ce faisant, l’administration entend faire aboutir le processus de « rationalisation » des archives diplomatiques, qui a déjà vu l’ouverture, en 2009, du pôle de la Courneuve et le déménagement, en 2010, des archives de l’Occupation en Allemagne et en Autriche (archives qui étaient jusqu’alors conservées à Colmar).

Ce projet ne nous semble pas opportun car il pose de nombreuses difficultés. Il risquerait d’engendrer des surcoûts disproportionnés tout en désorganisant durablement l’activité du centre. Le déménagement des archives mobiliserait en effet pendant plusieurs années des personnels qui ne pourraient pas se consacrer à l’accueil du public. Partant, il nuirait également au travail des chercheurs et des étudiants. Par ailleurs, une telle opération risquerait d’entraîner la saturation du centre de la Courneuve.

Claudine LEPAGE et moi-même soutenons la solution alternative proposée par les organisations syndicales, qui consiste à transférer les archives dans un bâtiment nantais dont le ministère est propriétaire. Une telle option serait moins coûteuse et permettrait d’assurer au centre un fonctionnement satisfaisant pendant la période de déménagement.

Vous trouverez, ci-dessous, la lettre que nous avons adressée à M. Alain JUPPÉ.

Monsieur le Ministre,

Nous tenons à vous faire part de notre inquiétude relative au projet de transfert d’une partie des archives diplomatiques de Nantes vers le centre de La Courneuve (Seine-Saint-Denis).

Il nous apparait en effet que cette démarche comporte des risques dont pâtirait lourdement le Centre des Archives diplomatiques de Nantes, des risques pour son prestige, son réseau d’influence, pour sa sécurité, mais aussi des risques financiers et humains sur lesquels nous souhaitons appeler votre attention afin de préserver la richesse et le potentiel du Centre.

Ce lieu conserve tous les documents du Quai d’Orsay provenant de ses postes à l’étranger, mais aussi des trésors historiques séculaires qui seraient décentralisés sur le site de la Courneuve, vidant ainsi du cœur même de sa substance le Centre de Nantes, au risque de le transformer en une sorte de service d’archives administratives.

Outre que cette démarche va à l’encontre de la politique de décentralisation de ces dernières années, elle compromet et menace la renommée de ce Centre et le travail important mené depuis des années par ses agents, le conseil général de Loire-Atlantique et la ville de Nantes. Ce travail de mise en valeur a conduit à des échanges fructueux menés avec les milieux universitaires du Grand Ouest (à l’origine notamment du développement du pôle d’histoire des relations internationales de l’université de Nantes) et à la venue de chercheurs du monde entier qui ont fait la réputation du Centre. Ce réseau d’échanges et de coopération qui s’est tissé durant des années met en péril, c’est le risque humain, l’équipe nantaise en charge des archives, dont la compétence et l’esprit de coopération ont su mettre en œuvre un savoir-faire et une conception de traitement de l’archive, parfois innovante, telle la norme ISAD (G).

Outre les risques pour la sécurité des archives, risques liés notamment aux conditions de déménagement et à la manipulation, les conséquences financières induites par ce transport vers le centre de La Courneuve de kilomètres d’archives installées dans l’entrepôt d’Orvault, à proximité de Nantes, à seule fin d’économiser la location de ce site, posent la question de la bonne gestion de ce projet. Une solution nantaise (l’acquisition de deux bâtiments jouxtant le CADN (anciens magasin de fourniture et imprimerie) apparait un bien meilleur compromis, susceptible de satisfaire tous les acteurs concernés.

Nous nous permettons, pour finir, d’insister sur la nécessité d’un projet à long terme qui assure la pérennité et l’unité du Centre des Archives Diplomatiques de Nantes alors que la solution actuellement envisagée, celle de son démantèlement vers La Courneuve, pourrait trouver bientôt sa limite, puisque les capacités de stockage de ce dernier site arriveraient à saturation dans les prochaines années.

Dans l’espoir d’avoir retenu votre attention sur les conséquences de ce projet pour la consultation de ces archives historiques, sur les risques financiers et sociaux qu’engagerait ce projet de déménagement vers la Courneuve, et vous en remerciant par avance, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’assurance de notre haute considération.