Les 13 et 14 mars, le Sénat a discuté le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.

En vue de l’examen des articles de ce texte, j’avais déposé un amendement prévoyant une dématérialisation des justificatifs d’existence que les retraités établis hors de France doivent fournir chaque année à leurs caisses de retraite françaises. Mon souhait était de permettre à ces personnes d’échapper aux aléas liés aux dysfonctionnements de nombreux services postaux étrangers.

Signé par la quasi-totalité des sénateurs représentant les Français établis hors de France, cet amendement est malheureusement passé sous les fourches caudines de l’article 41 de la Constitution, selon lequel les amendements qui ne sont pas du domaine de la loi peuvent être déclarés irrecevables.

La censure dont mon amendement a fait l’objet est d’autant plus incompréhensible et injuste que plusieurs codes comprennent des dispositions législatives prévoyant le transfert « par voie dématérialisée » de documents administratifs ou d’informations. Tel est notamment le cas du code général des impôts, du code de commerce et du code de la propriété intellectuelle.

De plus, le cadre juridique applicable aux certificats d’existence figure à l’article 83 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui prévoit que les retraités établis hors de France « doivent fournir une fois par an au plus à leurs caisses de retraite un justificatif d’existence ». En l’absence de justificatif renvoyé dans les formes et à la date fixée, le versement de la pension est suspendu « à l’expiration d’un délai minimal d’un mois à compter de la date fixée par la caisse de retraite pour la réception du justificatif ».

Par ailleurs, les caisses de retraite « peuvent mutualiser la gestion des certificats d’existence » [*]. Selon le GIP Union retraite, cette dernière disposition devrait enfin entrer en vigueur en juillet 2019. Les polypensionnés n’auront alors plus qu’un seul justificatif d’existence à fournir avec effet pour tous les régimes de retraite, ce dont je me réjouis.

À compter de l’été 2019, les retraités auront également la possibilité de créer, via le portail internet du GIP Union retraite, un espace personnel à partir duquel ils pourront télécharger et téléverser leur justificatif d’existence. Je m’en félicite. Et c’est précisément pour garantir la mise en œuvre de cet excellent dispositif que je souhaitais inscrire dans la loi le principe de la dématérialisation des certificats d’existence. Je regrette vivement d’en avoir été empêché.

Tout en déplorant le sort réservé à mon amendement, je me réjouis que le projet de loi comprenne des dispositions intéressant directement les Français établis hors de France.

L’article 23 bis prévoit le remplacement, à titre expérimental, du justificatif de domicile par l’attestation de résidence pour les demandes de duplicata de permis de conduire et de certificat d’immatriculation formulées par les Français résidant à l’étranger. Cette disposition a été insérée par l’Assemblée nationale, à l’initiative de plusieurs députés La République en Marche. Actuellement, les Français établis hors de France doivent produire un justificatif de domicile lorsqu’ils sollicitent la délivrance d’un duplicata de permis de conduire. Il en va de même s’agissant de la délivrance d’un certificat d’immatriculation pour un véhicule détenu en France (le certificat est délivré moyennant le paiement d’une taxe dont le produit est affecté à la région dans laquelle se situe le domicile du propriétaire du véhicule). Afin d’obtenir ces documents, nombre de demandeurs résidant à l’étranger se font domicilier de manière fictive en France. L’expérimentation de l’attestation de résidence comme justificatif de domicile sera menée pendant dix-huit mois dans l’ensemble du réseau consulaire. L’attestation de résidence ne devrait être délivrée qu’à la seule condition que le demandeur se présente en personne au poste consulaire muni d’un justificatif de domicile local datant de moins de trois mois.

Une autre expérimentation est prévue par l’article 24, qui concerne la dématérialisation de l’établissement, de la conservation, de la gestion et de la délivrance des actes de l’état civil dont le service central d’état civil du ministère des affaires étrangères et les autorités diplomatiques et consulaires sont dépositaires. Cette mesure sera prise par voie d’ordonnance et mise en œuvre pendant trois ans. Elle « permettra aux officiers de l’état civil de délivrer des copies intégrales et des extraits d’actes de l’état civil dématérialisés ayant la même valeur juridique que les copies ou extraits délivrés sur support papier ».

L’article 40 prévoit quant à lui la présentation au Parlement d’un rapport annuel sur quatre sujets, dont « les actions engagées par les administrations en vue d’adapter leurs horaires d’ouverture aux contraintes particulières des administrés ». Ce rapport « tirera, en particulier, les conséquences des nombreuses expérimentations qui seront conduites en ce sens en 2018 par les différentes administrations, et notamment [...] le réseau consulaire du ministère des affaires étrangères, dans vingt postes du réseau, identifiés sur la base du critère des communautés françaises inscrites au registre des français de l’étranger, parmi lesquels figurent : Genève, Londres, Bruxelles, Montréal, Tel Aviv, New York, Alger, San Francisco, Berlin, Sydney ». Cet article a malheureusement été supprimé par la majorité sénatoriale. Je souhaite qu’il puisse être rétabli par la commission mixte paritaire (CMP) ou, à défaut, par l’Assemblée nationale.

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[*] Le Sénat a adopté un amendement défendu par ma collègue Claudine Lepage, qui propose de rendre obligatoire la mutualisation de la gestion des certificats d’existence.