La commission des Lois du Sénat a adopté mercredi 18 juin une version sensiblement améliorée du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines, dit réforme pénale.

JusticeJe tiens à saluer le travail de mon collègue Jean-Pierre Michel, rapporteur du texte, qui a fait adopter une série d’amendements courageux et fidèles à ce que nous avons toujours défendu depuis plusieurs dernières années.

Le texte de la garde des Sceaux reprend en partie les recommandations issues du rapport de la conférence de consensus du 20 février 2013. L’objectif poursuivi par le gouvernement est d’améliorer la prévention de la récidive par une meilleure individualisation des peines et un suivi renforcé de leur application.

Loin des poncifs propagés par la droite qui semble avoir oublié sa réforme pénitentiaire de 2009, laquelle avait permis l’ouverture de nouveaux droits aux détenus et le développement des aménagements de peines et des alternatives à la détention provisoire, il ne s’agit en aucun d’un texte laxiste ou idéologique.

Au contraire, il traite avec réalisme les questions lancinantes de la récidive, de la non-exécution des peines (100.000 peines sont en attente d’application faute de place en prison) et des sorties « sèches » de prison.

Le principe est simple : une peine prononcée n’est efficace que si elle répond à la gravité des faits sanctionnés, est adaptée à la situation du condamné et est réellement appliquée avec un suivi permettant la réinsertion/réadaptation du condamné.

Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Un exemple parmi d’autre : chaque année, 35.000 personnes sont condamnées à une peine de prison ferme ou avec sursis dans un délit routier (conduite sans permis, en état d’ivresse… hors cas d’accidents). Ces peines de prison étant au final peu appliquées, sauf pour les récidivistes, ne peut-on pas trouver une peine alternative qui permette un réel travail d’éducation et de sensibilisation à la sécurité routière ?

C’est l’objet de la contrainte pénale qui sera applicable aux délits punis de moins de 5 ans d’emprisonnement – et non aux crimes comme le laisse entendre la droite. S’inspirant de modèles qui ont fait leurs preuves à l’étranger (Canada, Suède…), cette peine restrictive de liberté en milieu ouvert permet un accompagnement socio-éducatif individualisé du condamné. Le juge pourra imposer des obligations (injonction de soins, suivi d’un enseignement éducatif, d’une formation professionnelle, d’un programme de lutte contre la récidive, etc.) ou des interdictions (conduire un véhicule, fréquenter un débit de boisson, approcher une personne ou un lieu, etc.).

La contrainte pénale sera un outil supplémentaire (en plus des peines de prison et de l’amende) à la disposition du juge. La commission des Lois du Sénat a toutefois adopté un amendement faisant de la contrainte pénale la peine principale encouru pour un nombre déterminé de délits mineurs (vol simple, filouterie, usage de stupéfiants, occupation d’halls d’immeubles, certains délits routiers, etc.) qui exclut les atteintes aux personnes ou aux biens avec violence.

La police exercera un contrôle renforcé sur le respect des obligations et des interdictions tandis que le juge d’application des peines pourra renforcer le suivi, prononcer des mesures plus contraignantes ou révoquer la contrainte pénale pour la transformer en peine de prison. La commission des Lois du Sénat a également introduit une peine en cas de non-respect de la contrainte pénale fixée à deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

Elle a par ailleurs maintenu à deux ans d’emprisonnement le seuil permettant de bénéficier d’un aménagement de peine comme cela est possible depuis la loi pénitentiaire de 2009. Le virage sécuritaire prévu par le texte initial qui réduisait ce seuil à 1 an d’emprisonnement ne se justifiait pas, sinon pour donner des gages aux pourfendeurs du « laxisme ». De même, la Commission des lois a très justement rétabli le titre original du projet de loi « relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines » qui avait été transformé par l’Assemblée nationale en projet de loi « tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales » pour d’obscures raisons (d’affichage certainement).

Le texte prévoit en outre la suppression des peines planchers qui sont contraire à l’individualisation des peines, empiètent sur les pouvoirs du juge et l’empêchent notamment de prononcer une peine qu’il juge adaptée au profil du condamné, sans compter qu’elles ont montré leur parfaite inefficacité quant à la prévention de la récidive.

Enfin, la commission des Lois du Sénat a adopté une série d’amendements importants qui matérialisent des engagements antérieurs : la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs et de la rétention de sûreté, deux promesses de campagne de François Hollande, ainsi que la prise en compte de la situation des personnes atteintes de troubles mentaux conformément à la proposition de loi qui avait été adoptée en ce sens à l’unanimité au Sénat en 2011.

Je ne sais pas quel sort sera réservé à ces modifications dans la suite de l’examen du texte en séance publique au Sénat puis en commission mixte paritaire mais pour ma part je les soutiendrai car ils sont fidèles à ce que les sénateurs socialistes ont toujours défendu.