Pour une fois quittons les rivages arides et brutaux de la politique et profitons de la splendide exposition « Fauves et expressionnistes » au Musée Marmottan.

renardLe musée lui-même est déjà un sujet de curiosité : dès l’entrée, on erre dans de magnifiques salons second Empire meublés de ces tables d’acajou et de surtouts dorés du meilleur goût proustien. Il y a heureusement au mur plusieurs aquarelles et des gouaches de Berthe Morisot qui rachètent le reste. Et puis la salle des Monet qui constitue le fond permanent du musée, en particulier le célèbre « Impressions au soleil levant » sur la Tamise et qui donne son nom à l’impressionnisme. On découvre enfin un escalier qui descend vers l’exposition : une vraie merveille de goût et de pédagogie. 50 tableaux seulement, à taille humain donc. À partir de la collection du musée de Wuppertal, prêtée pour l’occasion, il s’agit de montrer le cheminement qui part du fauvisme, essentiellement français, au début du siècle, Matisse, Dufy, Vlaminck, Braque, … avec la libération de la couleur, qui passe en Allemagne avec « Die Brücke » (le pont), Emil Nolde, Karl Schmidt-Rottluff , … et « Der Blaue Reiter » (le cavalier bleu) de Vassily Kandinsky, Franz Marc, Gabriele Münter, qui à partir de Munich révolutionnèrent la peinture en supprimant progressivement « l’objet » annonçant ainsi l’art dit « abstrait », non figuratif, qu’on appellera, par une opposition discutable, l’expressionisme. Mais celui-ci n’aura pas le monopole et pendant la Première Guerre ou juste après, des artistes comme Otto Dix rendront compte des horreurs de Verdun ou de la Somme ou comme Oskar Kokoschka, de la difficulté à vivre dans un empire autrichien disparu.
Mais foin d’histoire de l’art. Laissons-nous porter par la seule contemplation de ces œuvres magnifiques : « la jeune fille aux pivoines » d’Alexej von Jawlensky, éclaboussé des rouges de sa chevelure, de sa robe et de ses fleurs ; « le renard bleu » de Franz Marc fondateur de Der Blaue Reiter, mort en 1916, « le petit train de Murnau » de Vassily Kandinsky avec ses jaunes et ses verts, « le pont » d’Emil Nolde tout en nuances parme et gris.   C’est un ravissement et cela rabiboche avec la vie et la beauté. Courrez y vite dès que vous êtes à Paris. C’est mieux que les Galeries Lafayette.