Après quinze jours de tournée en Chine, Corée, Japon, je retrouve la France. Un moment particulièrement intéressant pour moi a été la visite, en Corée, du site de la commission d’armistice à Panmunjom.

CheonanJ’ai profité du grand savoir du colonel Nass, attaché militaire français et spécialiste de la guerre de Corée. Je rappelle qu’à la suite de l’attaque en 1950 de la Corée du sud (au sud du 18ème parallèle) par la Corée du Nord et une armée de « volontaires » chinois commandée par Lin Biao, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a créé une armée sous son drapeau composée de troupes de plus de 20 pays ( avec une prédominance américaine), commandée par le général Mac Arthur , vainqueur de la guerre du Pacifique. Un bataillon français commandé par le général Monclar y participa. Après trois ans de combats très durs, plus de 50000 morts, et arrivés à une situation de blocage militaire, les deux protagonistes signèrent en 1953 un armistice à Panmunjom. C’est un lieu étonnant où court une ligne de démarcation matérialisée par une bande blanche, entourée de barbelés, avec des miradors de chaque côté. Il y a plusieurs baraques dont la salle de la commission d’armistice où se réunissent les militaires des deux camps pour discuter des violations du cessez-le-feu. Un lieu figé depuis près de 60 ans et qui fait référence à un monde qui a disparu, celui de la guerre froide. Il existe aussi une commission des « neutres » (Suisse et Suède) qui peut enquêter sur ces violations mais comme elle est interdite en Corée du Nord, elle ne peut mener à bien son mandat (et pourtant elle continue d’exister !). Cela m’a quand même permis de goûter du fendant et de la viande des Grisons sur la ligne de démarcation offert par le général suisse (c’est un grade très rare dans ce pays). Or la commission des « neutres » enquêtait à ce moment même sur le naufrage du navire de guerre sud coréen Cheonan (46 morts). En fait le travail était entre les mains des américains qui assurent le commandement en chef des troupes sous drapeau ONU et les coréens. La conclusion est que le Cheonan qui naviguait très près de la ligne de démarcation ouest a été coulé par une torpille tirée d’un sous marin de poche nord coréen. C’est un acte de guerre très fort et sur lequel on s’interroge. Certes il y a une tension permanente, le président sud coréen (centre gauche) n’étant pas favorable à un rapprochement trop rapide et inconditionnel avec le frère du Nord, contrairement aux partis de droite coréen. La Chine, qui est le seul soutien de l’imprévisible Corée du Nord, veut surtout la stabilité sur sa frontière (le fleuve Yalu) ainsi que l’accès aux matières premières de la région. Ce qui est étonnant, c’est qu’au même moment, les armées américaines et sud coréennes étaient en grandes manœuvres dans le coin et avaient déployé tout leur matériel de détection, ce qui laisse un grand doute sur leur efficacité. Que va-t-il se passer maintenant ? Probablement rien : quelques rodomontades côté sud coréen, la fermeture des usines installées dans la zone économique spéciale de Kaesong (employant de la main d’œuvre nord coréen à 30 dollars par mois) mais tout le monde a intérêt (Etats-Unis, Chine, ...) à ce que rien ne bouge. Un jeu terrible et 46 morts pour rien ! ... Coulé, vous dit-on !