Je veux saluer la maturité de la jeune démocratie tunisienne et le courage du chef du parti Ennahda, Rachid Ghannouchi qui s’est battu pour que son parti refuse l’introduction de la charia dans la Constitution tunisienne.

Rachid GhannouchiAprès avoir montré la voie lors de la révolution pacifique de janvier 2011, la Tunisie et fait acte fondamental en refusant les dérives salafistes et en continuant la politique de Habib Bourguiba. Il n’ y a pas de meilleure illustration d’un islam modéré qui a l’adhésion d’une grande majorité du  peuple tunisien. Je ne saurai mieux dire que l’éditorial du Monde daté du 28 mars (voir ci-dessous).

Ces islamistes qui disent non à la charia

L’histoire de la Tunisie post Ben Ah retiendra peut-être le lundi 26mars 2012 comme une date importante. Ce jour-là, le parti islamiste Ennahda, qui domine la vie politique, a dit non aux groupes extrémistes salafistes. Il a opposé un refus net et catégorique à l’introduction de la charia – la loi islamique – dans la Constitution du pays.

Ce faisant, Ennahda a accompli son premier acte de vrai parti de gouvernement, il a préféré la réalité à l’idéologie ; il s’est comporté en formation responsable ; il a pris le risque de l’affrontement avec une partie de la famille islamiste Il a privilégié l’empirisme étatique à la pureté sectaire.

Si Ennahda, que dirige Rachid Ghannouchi, tient cette ligne, alors la Tunisie, précurseur du « printemps arabe », restera un pays modèle – et qui rayonnera bien au delà de ses frontières. Au lendemain de l’indépendance, le premier président de ce petit État du Maghreb, Habid Bourguiba, a fait voter, en 1959, une Constitution des plus progressistes. Elle dote les Tunisiennes d’un code du statut de la femme sans équivalent dans la région. Quand la plupart des Lois fondamentales des pays arabo-musulmans font expressément allusion à la charia comme source du droit, la Constitution tunisienne s’en abstient. Elle se borne, dans son article premier à observer que l’islam est la religion du pays.

Ennahda est le groupe dominant à l’Assemblée élue au lendemain de la chute du président Zine El-Abbidine Ben Ali en janvier 2011. Il gouverne en coalition avec deux partis laïcs dans l’équipe du premier ministre, Hamadi Jebali.

Il était grand temps qu’Ennahda prenne position. Depuis quelques mois, une petite dizaine de milliers de militants salafistes – qui prônent la plus radicale des versions de l’islam politique – multiplient violences et provocations. Sur certains campus, ils agressent les femmes non voilées. Ils empêchent les manifestations culturelles. Ils convoquent des prières géantes au beau milieu de la capitale, d’où retentit un de leurs cris de ralliement : « Mort aux juifs ! »

Dans leurs rassemblements, ils arborent volontiers des treillis militaires, évocation d’un combat qui pourrait prendre des formes plus brutales.

Ennahda a senti le danger. Cet islam est profondément étranger aux Tunisiens, et encore plus aux Tunisiennes. Même celles d’entre elles qui votent Ennahda, et elles sont nombreuses à l’avoir fait, restent attachées au code du statut de la femme.

Parti de gouvernement, Ennahda sait qu’une dérive radicale mettrait la Tunisie au bord de la faillite. Elle ferait fuir touristes et investisseurs étrangers.

La pression salafiste des jours derniers a un objectif politique précis: forcer l’Assemblée, qui joue le rôle d’un corps constituant, à introduire une référence à la charia dans le nouvel article premier de la Constitution. C’est un défi qui est ainsi lancé à Ennahda. Qui y a répondu lundi avec courage et doit s’en tenir à cette réponse face à toute nouvelle offensive.