19 mai 2025

La poésie de Madagascar

 La culture malgache fait une grande place à la poésie ; elle l’a toujours fait mais elle souffre d’être peu éditée, peu diffusée et peu connue en dehors de la Grande Ile. C’est pourquoi il faut remercier Dominique Ranaivoson d’avoir recensé non pas tous les poètes mais du moins les plus significatifs en langue française. Elle a profité du soutien de la fondation Yavarhoussen qui s’efforce de faire connaître la culture malgache – sous toutes ses formes -initiative remarquable. Elle a ainsi pu être publiée par les prestigieuses éditions Seghers (« la poésie de Madagascar », par Dominique Ranaivoson). Une page entière dans le quotidien “Le Monde” du 8 mai ont projeté son ouvrage sur le devant de la scène.

Avant la conquête coloniale, les lettrés pratiquaient le “ Hain-teny”, forme de poésie similaire au haïku japonais : courte, souvent une histoire d’amour, avec parfois une conclusion morale. On doit à Jean Paulhan, qui fut un des premiers professeurs du tout nouveau collège français qui devait devenir le lycée Galliéni, d’avoir appris la langue malgache et couru la campagne pour recueillir le plus de Hain-teny possible. Un autre pratique est le kabary, discours parfois solitaire, parfois contradictoire sur n’importe quel sujet. Ce qui compte c’est l’art de celui qui parle, son éloquence, les citations qu’il glisse, les références historiques ou autres dont il émaille son propos. Promu au rang d’art national, le kabary est aujourd’hui largement pratiqué avec ses concours, ses émissions de radios, son enseignement.

Au début donc était la langue malgache, unifiée depuis un siècle même s’il y a des variantes régionales. Puis vint le français. Langue et culture du colonisateur, symbole du pouvoir, voie d’accès aux responsabilités et aux bons emplois, nul ne pouvait y échapper. Certains, rares, refusèrent de voir leur langue disparaître au profit du français. Mais la plupart, formés dans des écoles françaises, se l’approprièrent et ont écrit en malgache et en français. Nous avons les précurseurs qui courageusement se lancèrent : Robinary, et le grand Rabearivelo qui voulait tant devenir français ; puis ceux que l’on appelle les héritiers : Jacques Rabemananjara, qui fut aussi un militant indépendantiste, Flavien Ranaivo, les militants et les poètes contemporains, très nombreux.

Si vous ne connaissez pas la poésie malgache, il n’y a pas de plus belle occasion pour vous initier. Si vous la connaissez, quel plaisir de vous y ressourcer !

Quelques vers du poème « Antsa » (chant royal) de Jacques Rabemanandjara :

« Ile !

Île aux syllabes de flamme !

Jamais ton nom

Ne fut plus cher à mon âme »

© CC by SA 2.0

Richard Yung

Richard Yung, Sénateur des Français de l'étranger de 2004 à 2021, partage ici ses réactions à l'actualité.

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