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Je vous souhaite la bienvenue sur ce site archive de mon mandat de sénateur des Français hors de France.

Mandat que j'ai eu l'honneur de faire vivre de 2004 à 2021.
Ce site est une image à la fin de mon mandat.
Vous y trouverez plus de 2 000 articles à propos des Français de l'étranger. C'est un véritable témoignage de leur situation vis-à-vis de l'éducation, de la citoyenneté, de la protection sociale, de la fiscalité, etc. pendant ces 17 années.

Je me suis retiré de la vie politique à la fin de mon mandant en septembre 2021, je partage désormais mes réactions, points de vue, réflexion sur https://www.richardyung.fr

Merci de votre visite.

Richard Yung
Octobre 2021

Du 29 au 30 octobre, je suis intervenu lors du débat relatif au projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet. Ce texte vise à endiguer le téléchargement illégal d'œuvres protégées. Une Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) sera chargée de mettre en œuvre un système de riposte graduée.

Concrètement, l'HADOPI avertira les internautes se livrant au téléchargement illégal - ou accueillant sur leur accès Internet des pratiques similaires - des risques pénaux qu'ils encourent : premier avertissement par courrier électronique ; second avertissement par lettre recommandée ou par lettre d'huissier; sanctions allant de l'injonction à prendre des mesures de nature à faire cesser le manquement jusqu'à la suspension de l'abonnement à Internet pour une durée de 3 mois à 1 an.

Ce texte a le mérite de proposer des solutions pédagogiques au petit piratage. Nous avons réussi à faire adopter des amendements qui permettront de garantir le respect des droits des internautes : respect des données personnelles, possibilité donnée à l'HADOPI de prononcer des peines de suspension plus légères, possibilité donnée à l'abonné destinataire d'une recommandation de demander des précisions à l'HADOPI.

M. Richard Yung. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons ce soir est nécessaire. Tout le monde a souligné l’échec de la loi du 1er août 2006 qui, sur les sujets du téléchargement illégal, de la copie et du piratage, n’a nullement empêché le viol du droit moral des créateurs.

En dépit des sanctions très lourdes fixées par ce texte – trois ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende –, toute une génération a vécu, et vit toujours, avec l’idée, du moins pour les plus jeunes d’entre eux, que les biens culturels doivent être gratuits. Le pillage des œuvres continue de faire des ravages dans l’industrie culturelle. Plusieurs de mes collègues l’ont rappelé ; je n’y reviendrai donc pas.

Mais quel temps perdu ! En effet, le projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis aurait dû être adopté en 2006, en lieu et place de la loi DADVSI. Souvenons-nous de ce débat brouillon au cours duquel les positions du Gouvernement avaient varié d’un extrême à l’autre. La très polémique licence globale était venue parasiter l’examen d’un texte comprenant des dispositions totalement inapplicables.

Je le redis, après tant d’autres : la défense des créateurs doit être au cœur de nos préoccupations. Le respect de leurs droits est un impératif catégorique qui fonde notre exception et notre politique culturelle française. L’enjeu est immense car il nous faut protéger ce système unique en Europe – et même, probablement, au monde – si nous ne voulons pas passer sous les fourches caudines de la culture anglo-saxonne.

Sans droit d’auteur, Gounod, Bizet et Saint-Saëns, pour ne citer que ceux-là, ne nous auraient jamais offert leurs opéras et leurs symphonies. Le cinéma français aurait disparu depuis longtemps. Mais c’est surtout aux jeunes créateurs qu’il faut penser car, plus que d’autres, ils dépendent du droit d’auteur pour consolider leurs premiers pas.

Le présent projet de loi est équilibré, dans la mesure où il concilie les droits des créateurs et la liberté des utilisateurs du réseau internet. En ce sens, il est mieux adapté à l’ère numérique que la loi précédente.

Contrairement à la polémique qui fait rage, il ne s’agit pas d’un texte liberticide. Ce qui est liberticide, c’est de nier la création et le droit d’auteur qui doit la rémunérer. Il est faux et déraisonnable d’affirmer que l’accès à internet constitue une liberté fondamentale. Aucune jurisprudence française n’a dégagé un tel principe. Si tel devait être le cas, qu’en serait-il alors de l’accès au téléphone ? Quand vous ne payez pas vos factures de téléphone, on vous coupe bien la ligne… Cela dit, il ne me semble pas scandaleux que la suspension de l’abonnement soit prononcée par une autorité administrative indépendante, de surcroît composée de magistrats et de fonctionnaires chargés de fonctions juridictionnelles.

D’autres garanties doivent être soulignées. Les agents de la HADOPI, qui seront chargés du traitement des saisines, seront astreints au secret professionnel et devront respecter un code de déontologie. Les données qui leur seront transmises ne porteront pas sur les correspondances des internautes et seront effacées à l’issue de la période de suspension de l’abonnement. Les DRM seront supprimées : c’est tout de même un progrès considérable !

Par ailleurs, comme cela a été souligné à plusieurs reprises, la possibilité de proposer une transaction à l’internaute passible d’une sanction me semble être une réponse intéressante, à mi-chemin entre pédagogie et sanction. Sur ce point, je pense même qu’il serait concevable que la HADOPI ait la possibilité de réduire le débit de la connexion internet afin d’empêcher les fraudeurs de récidiver.

Au cours de la discussion des articles, nous proposerons de consolider le mécanisme de la riposte graduée. D’autres garanties peuvent en effet être apportées, notamment en matière de respect de la vie privée.

Le projet de loi attire également une critique majeure en ce qu’il fait l’impasse sur le développement de l’offre légale. Ce point a déjà été souligné à plusieurs reprises mais je tiens à y revenir. Si le projet de loi pose la question de la démocratisation de l’accès à la culture, il fait en revanche l’impasse sur le développement de l’offre légale. Dans ce domaine, on ne constate aucun progrès, mais au contraire une grande lenteur, peut-être même un peu de mauvaise volonté de la part de certains. Il est pourtant urgent d’agir ! Nous nous devions, aujourd’hui, de le rappeler !

Je souhaite également insister sur la nécessité de créer une plate-forme publique gratuite destinée à promouvoir le travail d’artistes n’ayant pas accès aux plates-formes commerciales. À cet égard, madame la ministre, la loi DADVSI prévoyait l’élaboration d’un rapport qui ferait le point sur toutes ces questions. Nous l’attendons toujours ! C’est tout à fait regrettable !

On pourrait également imaginer quelques propositions « collatérales ». Je les livre très rapidement. Certaines dispositions devraient ainsi être adoptées afin de protéger les internautes contre certaines dérives. Je pense notamment aux systèmes de limitation d’accès pour les mineurs, que l’on devrait rendre obligatoires, mais aussi à la protection de nos concitoyens contre l’exploitation commerciale de leurs données personnelles.

Telles sont, pour l’essentiel, les observations que nous voulions faire au stade de la discussion générale. Vous l’aurez compris, nous aborderons ce projet de loi de façon positive, et avec la volonté de l’enrichir.

Pour conclure, laissez-moi vous livrer cette citation d’un auteur aujourd’hui oublié, Denis de Rougemont : « toute œuvre humaine, même la plus simple, exige et suppose un avenir ». Évidemment, il ne pensait pas à internet. Mais notre devoir, ce soir, c’est d’offrir un avenir aux œuvres de l’esprit ! (Applaudissements sur l’ensemble des travées.)