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Je vous souhaite la bienvenue sur ce site archive de mon mandat de sénateur des Français hors de France.

Mandat que j'ai eu l'honneur de faire vivre de 2004 à 2021.
Ce site est une image à la fin de mon mandat.
Vous y trouverez plus de 2 000 articles à propos des Français de l'étranger. C'est un véritable témoignage de leur situation vis-à-vis de l'éducation, de la citoyenneté, de la protection sociale, de la fiscalité, etc. pendant ces 17 années.

Je me suis retiré de la vie politique à la fin de mon mandant en septembre 2021, je partage désormais mes réactions, points de vue, réflexion sur https://www.richardyung.fr

Merci de votre visite.

Richard Yung
Octobre 2021

Dimanche dernier, le Conseil d’Administration de Danone a acté le départ d’Emmanuel Faber, PDG du groupe depuis 2017. Les fonds activistes Bluebell Capital (anglais) et Artisan Partners (américain) faisaient campagne pour son départ depuis quelque temps, arguant la performance de Danone a décliné par rapport à ses concurrents, Unilever et Nestlé, sous sa direction.

Pourtant, Faber a tenté de lâcher du lest. En novembre 2020, il avait annoncé un plan de suppression de 1500 à 2000 emplois et une nouvelle réorganisation de l’entreprise, davantage tournée vers le local. Début mars, il avait renoncé à la fonction de directeur général, suite aux pressions exercées par les fonds activistes.

Sous la houlette d’Emmanuel Faber, Danone a pris un tournant décisif en s’engageant pour la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Le 26 juin 2020, Danone est la première entreprise du CAC 40 à se transformer en « entreprise à mission », disposition prévue par la loi PACTE. Ainsi, en plus de générer des profits, Danone doit aussi, statutairement, remplir des objectifs sociaux, sociétaux et environnementaux. Engagé pour le capitalisme responsable, Faber s’était illustré en prononçant en 2016 à HEC un discours en faveur de la justice sociale, et avait également renoncé à la retraite chapeau. Malheureusement, les résultats financiers ne sont pas au goût des actionnaires. En 2020 (année de la covid), le chiffre d’affaires de Danone chute de 6,6%, et la marge opérationnelle ainsi que le cours en bourse baissent également. La marge est toutefois de 14%, avec un chiffre d’affaires de 23,6 milliards d’euros et un résultat opérationnel de 3,3 milliards. Pas assez pour les fonds activistes... Ce dilemme danonien, opposant performance financière et engagement écologique et sociétal, est en réalité symptomatique des entreprises qui s’engagent pour la RSE. Nous restons dans un monde où le chiffre reste le principal critère utilisé par les marchés pour évaluer les dirigeants d’entreprise.

Un article du Monde (1) a récemment mis en lumière une étude américaine sur le lien entre RSE et longévité des dirigeants des grandes entreprises (Hubbard, T.D., Christensen, D.M. et Graffin, S.D., 2017, « Higher highs and higher lows : The role of corporate social responsibility in CEO dismissal », Strategic Management Journal, vol. 38, no. 11). Les résultats sont édifiants : Les investissements dans la RSE n’ont aucun effet sur la longévité des dirigeants mais exacerbent l’impact de la performance financière sur le sort que les actionnaires leur réservent. Ainsi, un PDG qui a de bons résultats financiers et qui investit dans la RSE a deux fois moins de chance (53%) de perdre son poste qu’un PDG qui a de bons résultats financiers mais qui investit peu dans la RSE. Mais la situation s’inverse lors d’une mauvaise performance financière : un PDG qui investit beaucoup dans la RSE mais qui a de mauvais résultats financiers a quasiment deux fois plus de chances (84% !) d’être licencié, par rapport à un PDG ayant de mauvais résultats financiers et investissant peu dans la RSE. Emmanuel Faber se trouvait donc dans la position la plus délicate pour un dirigeant...

Il est clair que les marchés accordent encore beaucoup d’importance à la performance financière. Le licenciement de Faber n’est pas symbole d’un échec du capitalisme responsable, mais met en lumière les failles des critères d’évaluation des marchés, encore trop ancrés dans une logique de profit. Le capitalisme purement financier n’est pas adapté aux défis du XXIe siècle, tout comme les velléités de ces fonds d’investissements anglo-saxons qui ont poussé Faber vers la sortie.

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(1) Le Monde, 7 mars 2021, Danone : « Les marchés considèrent que le PDG a mis l’accent sur la RSE au détriment de la création de valeur pour les actionnaires ».